La voiture qui conduit toute seule n’est plus de la science-fiction. Mais en Europe, plusieurs obstacles techniques, réglementaires et sociaux freinent encore sa généralisation. Dans cet article, nous allons explorer les forces et faiblesses du vieux continent face à cette révolution, et ce qu’il faut pour rattraper son retard.
À retenir
- L’UE pâtit de réglementations fragmentées, d’infrastructures hétérogènes et de réseaux numériques inégaux.
- Des acteurs comme Waymo (États-Unis) ou Baidu (Chine) progressent plus vite que l’Europe.
- Les voitures autonomes pourraient transformer la ville : moins de parking, trafic optimisé, mobilité revisitée.
- Mais les défis sont nombreux : sécurité cyber, questions d’éthique, emploi, responsabilités légales.
Contexte actuel : où en est l’Europe ?
L’avance des États-Unis, de la Chine et du Royaume-Uni
Aux États-Unis, des services de robotaxi (comme Waymo) fonctionnent déjà dans plusieurs villes. En Chine, Baidu déploie son service « Apollo Go » dans une quinzaine de villes. Au Royaume-Uni, la loi sur les véhicules automatisés (Automated Vehicles Act) adoptée en 2024 crée un cadre légal unifié, avec des tests pilotes prévus dès 2026.
Les faiblesses européennes
- Réglementation morcelée : chaque État membre applique ses propres règles sur les tests et déploiements des voitures autonomes.
- Infrastructure routière inégale : différences de signalisation, de marquage ou de normes routières perturbent les systèmes d’analyse visuelle des véhicules.
- Réseaux numériques disparates : couverture 5G et connectivité V2X (vehicle-to-everything) encore insuffisantes dans certaines zones.
- Questions de responsabilité non résolues : en cas d’accident, qui est responsable — le constructeur, le développeur logiciel, le passager ?
Ce que les voitures autonomes pourraient changer
Des villes repensées
Avec moins de voitures garées, on peut libérer l’espace urbain : remplacer des parkings par des jardins, des terrasses ou des pistes cyclables. Les véhicules autonomes pourraient aussi interagir avec l’infrastructure urbaine pour optimiser les feux, fluidifier le trafic et diminuer les embouteillages.
Mobilité et temps libéré
Imaginez que votre trajet devienne du temps « libre » : vous pourriez lire, travailler ou vous détendre au lieu de conduire. Ce scénario est au cœur de la promesse des véhicules autonomes.
Les risques à anticiper
Disparition d’emplois
Des millions de personnes travaillent dans le transport ou la logistique en Europe. Une automatisation massive pourrait provoquer une perte de revenus estimée à 14 milliards d’euros par an aux Pays-Bas selon un calcul de KPMG. Des programmes de reconversion professionnelle seront indispensables.
Dilemmes éthiques et décisions critiques
Une voiture autonome devra parfois choisir entre deux scénarios dommageables (collision, piéton, obstacle). Comment programmer un « choix moral » ? Ce genre de décision soulève des débats complexes.
Sécurité et cyberattaques
Une voiture connectée est plus vulnérable aux piratages. En 2024, une attaque nommée MadRadar démontra que des voitures autonomes pouvaient être manipulées pour détecter des voitures fictives.
Condition préalable : l’infrastructure
Des routes intelligentes
Pour que la voiture autonome voit et réagisse correctement, les routes doivent respecter une standardisation : signalisation homogène, marquage clair, panneaux lisibles. Cela manque encore dans de nombreux pays d’Europe.
Réseaux digitaux performants
La connectivité est essentielle : 5G stable, liaison V2X pour échange de données entre véhicules et infrastructure, et cartes numériques à jour.
L’adoption est aussi une question de mentalité
- Les utilisateurs exigent des niveaux de sécurité plus élevés pour les systèmes automatisés que pour les conducteurs humains.
- Beaucoup surestiment leur propre conduite, ce qui les rend plus critiques vis-à-vis d’une IA au volant.
- Dans des scénarios complexes (crépuscule, intersections, environnements urbains), les voitures autonomes commettent encore plus d’erreurs que des conducteurs humains.
Quelle échéance pour les AV en Europe ?
Sur le podcast Kia’s Next Big Drive, Jelle Prins prédit que les voitures autonomes seront présentes « bientôt » en Europe. Techniquement, les progrès sont là, mais socialement et politiquement, le continent est encore en retard. Le défi n’est plus de savoir si les voitures autonomes arriveront, mais comment l’Europe s’y adaptera.
L’avènement des voitures autonomes pourrait transformer nos villes, nos déplacements et nos vies. Mais l’Europe doit surmonter des obstacles majeurs : réglementation fragmentée, infrastructures inégales, défis techniques et humains.
Pour réussir, il faudra harmoniser les normes, investir massivement dans la connectivité et lancer des initiatives sociétales anticipées pour préparer la transition.

